domingo, marzo 04, 2018

La Question Se Pose De...


Ce qui est grave
est que nous savons
qu’après l’ordre
de ce monde
il y en a un autre.

Quel est-il?

Nous ne le savons pas.

Le nombre et l’ordre des suppositions possibles
dans ce domaine
est justement
l’infini!

Et qu’est-ce que l’infini?

Au juste nous ne le savons pas!

C’est un mot
dont nous nous servons
pour indiquer
l’ouverture
de notre conscience
vers la possibilité
démesurée,
inlassable et démesurée.

Et qu’est-ce au juste que la conscience?

Au juste nous ne le savons pas.

C’est le néant.

Un néant
dont nous nous servons
pour indiquer
quand nous ne savons pas quelque chose
de quel côté
nous ne le savons
et nous disons
alors
conscience,
du côté de la conscience,
mais il y a cent mille autres côtés.

Et alors?

Il semble que la conscience
soit en nous
liée
au désir sexuel
et à la faim;

mais elle pourrait
très bien
ne pas leur être
liée.

On dit,
on peut dire,
il y en a qui disent
que la conscience
est un appétit,
l’appétit de vivre;

et immédiatement
à côté de l’appétit de vivre,
c’est l’appétit de la nourriture
qui vient immédiatement à l’esprit;

comme s’il n’y avait pas de gens qui mangent
sans aucune espèce d’appétit;
et qui ont faim.

Car cela aussi
existe
d’avoir faim
sans appétit;

et alors?


Alors
l’espace de la possibilité
me fut un jour donné
comme un grand pet
que je ferai;
mais ni l’espace,
ni la possibilité,
je ne savais au juste ce que c’était,

et je n’éprouvais pas le besoin d’y penser,

c’étaient des mots
inventés pour définir des choses
qui existaient
ou n’existaient pas
en face de
l’urgence pressante
d’un besoin:
celui de supprimer l’idée,
l’idée et son mythe,
et de faire régner à la place
la manifestation tonnante
de cette explosive nécessité:
dilater le corps de ma nuit interne,

du néant interne
de mon moi

qui est nuit,
néant,
irréflexion,

mais qui est une explosive affirmation
qu’il y a
quelque chose
à quoi faire place:
mon corps.

Et vraiment
le réduire à ce gaz puant,
mon corps?
Dire que j’ai un corps
parce que j’ai un gaz puant
qui se forme
au dedans de moi?

Je ne sais pas
Mais
je sais que

l’espace,
le temps,
la dimension,
le devenir,
le futur,
l’avenir,
l’être,
le non-être,
le moi,
le pas moi,

ne sont rien pour moi;

mais il y a une chose
qui est quelque chose,
une seule chose
qui soit quelque chose,
et que je sens
à ce que ça veut
SORTIR:
la présence
de ma douleur
de corps,

la présence
menaçante,
jamais lassante
de mon
corps;

si fort qu’on me presse de questions
et que je nie toutes les questions,
il y a un point
où je me vois contraint
de dire non,

NON

alors
à la négation;

et ce point
c’est quand on me presse,

quand on me pressure
et qu’on me trait
jusqu’au départ
en moi
de la nourriture,
de ma nourriture
et de son lait,
et qu’est-ce qui reste?

Que je suis suffoqué;
et je ne sais pas si c’est une action
mais en me pressant ainsi de questions
jusqu’à l’absence
et au néant
de la question
on m’a pressé
jusqu’à la suffocation
en moi
de l’idée de corps
et d’être un corps,

et c’est alors que j’ai senti l’obscène

et que j’ai pété
de déraison
et d’excès
et de la révolte
de ma suffocation.

C’est qu’on me pressait
jusqu’à mon corps
et jusqu’au corps

et c’est alors
que j’ai tout fait éclater
parce qu’à mon corps
on ne touche jamais.













Antonin Artaud

Lettre Aux Médecins Chefs Des Asiles De Fous


Messieurs,

Les lois, la coutume vous concèdent le droit de mesurer l'esprit. Cette juridiction souveraine, redoutable, c'est avec votre entendement que vous l'exercez. laissez-nous rire. la crédulité des peuples civilisés, des savants, des gouvernements pare la psychiatrie d'on ne sait quelles lumières surnaturelles. Le procès de votre profession est jugé d'avance. Nous n'entendons pas discuter ici la valeur de votre science, ni l'existence douteuse des maladies mentales. Mais, pour cent pathogénies prétentieuses où se déchaîne la confusion de la matière et de l'esprit, pour cent classifications dont les plus vagues sont encore les plus utilisables, combien de tentatives nobles pour approcher le monde cérébral où vivent tant de vos prisonniers? Combien êtes-vous par exemple, pour qui le rêve du dément précoce, les images dont il est la proie sont autre chose qu'une salade de mots?

Nous ne nous étonnons pas de vous trouver inférieurs à une tâche pour laquelle il n'y a que peu de prédestinés. Mais nous nous élevons contre le droit attribué à des hommes, bornés ou non, de sanctionner par l'incarcération perpétuelle leurs investigations dans le domaine de l'esprit.
Et quelle incarcération! On sait - on ne sait pas assez- que les asiles, loin d'être des asiles, sont d'effroyables geôles, où les détenus fournissent une main-d'œuvre gratuite et commode, où les sévices sont la règle, et cela est toléré par vous. L'asile d'aliénés, sous le couvert de la justice, est comparable à la caserne, à la prison, au bagne.

Nous ne soulèverons pas ici la question des internements arbitraires, pour vous éviter la peine de dénégations faciles. Nous affirmons qu'un grand nombre de vos pensionnaires, parfaitement fous selon la définition officielle, sont eux aussi, arbitrairement internés. Nous n'admettons pas qu'on entrave le libre développement d'un délire, aussi légitime, aussi logique que toute autre succession d'idées ou d'actes humains. La répression des réactions antisociales est aussi chimérique qu'inacceptable en son principe. Tous les actes individuels sont antisociaux. Les fous sont les victimes individuelles par excellence de la dictature sociale ; au nom de cette individualité qui est le propre de l'homme, nous réclamons qu'on libère ces forçats de la sensibilité puisque aussi bien il n'est pas au pouvoir des lois d'enfermer tous les hommes qui pensent et agissent.

Sans insister sur le caractère parfaitement génial des manifestations de certains fous, dans la mesure où nous sommes aptes à les apprécier, nous affirmons la légitimité absolue de leur conception de la réalité, et de tous les actes qui en découlent.

Puissiez-vous vous en souvenir demain matin à l'heure de la visite, quand vous tenterez sans lexique de converser avec ces hommes sur lesquels, reconnaissez-le, vous n'avez d'avantage que celui de la force.



De: Hombre Mirando Al Sudeste


Antonin Artaud


sábado, marzo 03, 2018

Lettre Aux Recteurs Des Universités Européennes


Monsieur le Recteur,

Dans la citerne étroite que vous appellez «Pensée», les rayons spirituels pourrissent comme de la paille. Assez de jeu de langue, d’artifices de syntaxe, de jongleries de formules, il y a à trouver maintenant la grande Loi du cœur, la Loi qui ne soit pas une loi, une prison, mais un guide pour l’Esprit perdu dans son propre labyrinthe. Plus loin que ce que la science pourra jamais toucher, là ou les faisceaux de la raison se brisent contre les nuages, ce labyrinthe existe, point central ou convergent toutes les forces de l’être, les ultimes nervures de l’esprit. Dans ce dédale de murailles mouvantes et toujours déplacées, hors de toutes formes connues de pensée, notre Esprit se meut, épiant ses mouvements les plus secrets et spontanés, ceux qui ont un caractère de révélation, cet air venu d’ailleurs, tombé du ciel.

Mais la race des prophètes s’est éteinte. L’Europe se cristallise, se momifie lentement sous les bandelettes de ses frontières, de ses usines, de ses tribunaux, de ses universités. L’Esprit gelé craque entre les ais minéraux qui se resserrent sur lui. La faute en est à vos systèmes moisis, à votre logique de 2 et 2 font 4, la faute en est à vous, Recteurs, pris au filet des syllogismes. Vous fabriquez des ingénieurs, des magistrats, des médecins à qui échappent les vrais mystères du corps, les lois cosmiques de l’être, de faux savants aveugles dans l’outre-terre, des philosophes qui prétendent à reconstruire l’Esprit. Le plus petit acte de création spontanée est un monde plus complexe et plus révélateur qu’une quelconque métaphysique. Laissez-nous donc, Messieurs, vous n’êtes que des usurpateurs. De quel droit prétendez-vous canaliser l’intelligence, décerner des brevets d’esprit? Vous ne savez rien de l’Esprit, vous ignorez ses ramifications les plus cachées et les plus essentielles, ces empreintes fossiles si proches des sources de nous-mêmes, ces traces que nous parvenons parfois à relever sur les gisements les plus obscurs de nos cerveaux.

Au nom même de votre logique, nous vous disons: la vie pue, Messieurs. Regardez un instant vos faces, considérez vos produits. À travers le crible de vos diplômes, passe une jeunesse efflanquée, perdue. Vous êtes la plaie d’un monde, Messieurs, et c’est tant mieux pour ce monde, mais qu’il se pense un peu moins à la tête de l’humanité.






Antonin Artaud


jueves, marzo 01, 2018

Black Bandillera


The flower of a fighting toro
is mourning, affixed since birth.
The path of a fighting toro
is the arena, and later the scales.
If condemned by nature
to death by the sword,
remember-the shrewd cowardice of the fox
for the bull is not ceremony.
No way out, old chap.
One must die properly.
One must die excellently
to intimidate enemies.
After the fight all the same
someone by custom
will mark a sign with chalk:
'Such and such number of kilograms.'
A carcass goes by kilograms.
Courage is measured in grams.
A carcass goes for meat.
Courage goes against the pricks.
It’s foolish to be daring, if
it’s immaturity of the mind.
It’s foolish to be a coward, if
you’re surrounded anyway.
Why fuss in the arena?
You’re a fine little bull.
Why pretend to be lame?
Your legs are still strong.
Hey, you clumsy malingerer...
Some were stronger than you-
in the end they divide up everyone
on hooks in the meat shop.
Fling yourself shabbily to meet
the hungering band-or else
for the crowd’s pleasure
the slippery bandilleros will thrust
black banderillas,
black banderillas
like flares of shame,
into the nape of your neck.
Fool, what’s there for you to win
in a miserable game with rogues? !
Those afraid of the fight
are not suited for the corrida.
Scraggy, streetwalker-cows
will lure you from the arena
with delicate little bells,
well, and then under the knife.
Since it all ends anyway,
let it end in a sweat.
Let the butchers’ ballet dancers
huff and puff and dance.
Be a real toro!
Don’t lower yourself to the level
of this crowd made up of
nothing but cowardly bulls.
Have they given many grams
of courage to the world?
And the black banderillas,
the black banderillas
graze the walls,
blinds, and door frames,
plunged into jackets
like trembling skin.






Yevgeny Yevtushenko


miércoles, febrero 28, 2018

Me gustaría...


Me gustaría
                            nacer en todos los países,
tener un pasaporte
                            para todos
que provoque el pánico de las cancillerías;
ser cada pez
                            en cada océano
y cada perro
                            en las calles del mundo.
No quiero arrodillarme
                            ante ídolo alguno
ni hacer el papel
                            de un ruso ortodoxo hippie,
pero me gustaría
                            hundirme
                            en lo más hondo del Lago Baikal
y salir resoplando
                            en otras aguas,
                            ¿por qué no en las del Mississippi?

En mi maldito universo amado
                             me gustaría
ser una hierba humilde,
                             nunca un Narciso delicado
que se besa
                             en el espejo.
Me gustaría ser
                             cualquiera de las criaturas de Dios,
incluso la última hiena sarnosa,
pero nunca un tirano,
                             ni siquiera el gato de un tirano.
Me gustaría
                             reencarnar como hombre
                                         en cualquier imagen:
víctima de una cárcel de tortura,
                             un niño vagabundo en los tugurios de Hong Kong ,
un esqueleto viviente en Bangladesh,
                             un pordiosero sagrado en el Tíbet,
un negro de Ciudad del Cabo,
pero nunca encarnar
                              la imagen de Rambo.
Sólo odio a los hipócritas,
                              hienas sazonadas en espesa melaza.
Me gustaría tenderme
                              bajo el bisturí de todos los cirujanos del mundo,
ser un tullido, un ciego,
                              sufrir todo mal, toda deformidad y herida,
ser un mutilado de guerra,
                              o el que recoge las colillas del suelo,
con tal de que no las penetre
                              el infame microbio de la prepotencia.
No quisiera formar parte de la élite,
                               ni, por supuesto, del rebaño de cobardes,
ni perro de manada,
                               ni pastor servil al abrigo de su rebaño.
Y quisiera ser feliz,
                               pero no a costa de los infelices.
Y quisiera ser libre,
                               pero no a costa de los que no lo son.
Quisiera amar
                               a todas las mujeres del mundo,
y ser también una mujer
                               sólo una vez...

La madre naturaleza ha menospreciado al hombre.
¿Por qué no lo hizo capaz de ser madre?
Si se agitara un niño
                               bajo su corazón,
acaso el hombre
                               sería menos cruel.
Quisiera ser el pan de cada día,
digamos,
                               ser la taza de arroz
                               de la sufriente madre vietnamita,
el vino barato
                               en las tabernas de los obreros napolitanos,
o el tubito de queso
                               en la órbita lunar.
Que me coman
                               que me beban,
                                                  dejadme ser útil
                                                                            en la muerte.

Quisiera pertenecer a todas las edades,
                                atolondrar la historia
                                            y atontarla con mis travesuras.
Quisiera llevarle a Nefertiti
                                en una troika á Pushkin.
Quisiera multiplicar
                                cien veces el espacio de un instante
para que al mismo tiempo
                                pueda beber vodka con los pescadores siberianos,
y junto a Homero,
                                        Dante,
                                                           Shakespeare
                                                                                      y Tolstoi
sentarme a beber cualquier cosa,
                                salvo, por supuesto,
                                                                          Coca-Cola.
Y bailar al ritmo de los tam-tam en el Congo,
estar en huelga en Renault,
jugar a la pelota con los muchachos brasileños
                                en la playa de Copacabana.

Quisiera hablar todas las lenguas,
                                como las aguas ocultas bajo la tierra,
y hacer todo tipo de trabajo de una vez.
                                Me aseguraría
                de que sólo fue poeta un Yevtushenko,
                                el otro un clandestino
                                                                    en alguna parte,
no puedo decir dónde
                                por razones de seguridad.
El tercero, un estudiante en Berkeley,
                                 y el cuarto un entusiasta huaso chileno.
El quinto sería tal vez
                                 un maestro de niños esquimales en Alaska,
el sexto
                un joven presidente
                                 en cualquier parte, modestamente digamos Sierra Leona,
el séptimo
               podría entretenerse en la cuna con un sonajero,
y el décimo,
                           el centésimo,
                                                          el millonésimo...
Para mí, ser yo mismo no es bastante,
                                ¡dejadme ser todo el mundo!
Estaré en miles de ejemplares hasta mi último día
                                para que la tierra vibre conmigo
y las computadoras enloquezcan
                                procesando mi censo universal.
Quisiera combatir en todas tus barricadas,
humanidad,
y morir cada noche
                               como una luna exhausta,
y amanecer cada día
                               como sol recién nacido
con una suave mancha inmortal
                               en la cabeza.
Y cuando muera,
un Francois Villon siberiano,
                               que no descanse mi cuerpo
                               ni en la tierra francesa,
                                                 ni italiana,
sino en la tierra rusa, amarga,
                               en una colina verde,
donde por vez primera
                               me sentí todo el mundo.









Yevgeny Yevtushenko




*Poema escrito originalmente en español


lunes, febrero 26, 2018

Cotidiano

(Português)


Todo dia ela faz tudo sempre igual

Me sacode às seis horas da manhã
Me sorri um sorriso pontual
E me beija com a boca de hortelã

Todo dia ela diz que é pra eu me cuidar
E essas coisas que diz toda mulher
Diz que está me esperando pro jantar
E me beija com a boca de café 

Todo dia eu só penso em poder parar
Meio-dia eu só penso em dizer não
Depois penso na vida prá levar
E me calo com a boca de feijão

Seis da tarde, como era de se esperar
Ela pega e me espera no portão
Diz que está muito louca prá beijar
E me beija com a boca de paixão

Toda noite ela diz prá eu não me afastar
Meia-noite ela jura eterno amor
Me aperta prá eu quase sufocar
E me morde com a boca de pavor






Chico Buarque


Cotidiano

(Español)


Cada día ella siempre hace todo igual

Me despierta a las seis antes que el sol
Me sonrie con sonrisa puntual
Y me besa con boca de mentol

Todo el día ella dice "te has de cuidar"
Cosas que dice siempre una mujer
Dice que está esperándome a almorzar
Y me besa con boca de café

Todo el día yo pienso en poder parar
Al mediodía pienso en decir no
Luego pienso en la vida y continuar
Y me callo con boca de arroz

En la tarde, a las seis, era de esperar
Ella viene y me espera en el portón
Dice estar como loca por besar
Y me besa con boca de pasión

Cada noche me pide a su lado estar
Medianoche y me jura eterno amor
Y me aprieta hasta hacerme sofocar
Y me besa con boca de pavor







Chico Buarque




domingo, febrero 25, 2018

¡Danza, Mulata!


Danza, mulata, danza,
mientras canta
en el tambor de los abuelos
el son languidecente de la raza.


Alza tus manos ágiles
para apresar el aire,
envuélvete en tu cuerpo
de rugiente deseo,
donde late la queja de las gaitas
bajo el ardor de tu broncínea carne.

Deja que el sol fustigue
tu belleza demente,
que corra por tus flancos inquietantes
el ritmo que tus senos estremece.

Aprisiona en tu talle atormentado
esa música bruja
que acompasa la voz de la canción.

¡Danza, mulata, danza!
En tus piernas veloces y en el son
que ha empapado tus lúbricas caderas
doscientos siglos se agazapan.

¡Danza, mulata, danza!
Tú y yo sentimos en la sangre
galopar el incendio de una misma nostalgia.





Jorge Artel



sábado, febrero 24, 2018

El Abuelo


Esta mujer angélica de ojos septentrionales,
que vive atenta al ritmo de su sangre europea,
ignora que en lo hondo de ese ritmo golpea
un negro el parche duro de roncos atabales.

Bajo la línea escueta de su nariz aguda,
la boca, en fino trazo, traza una raya breve,
y no hay cuervo que manche la solitaria nieve
de su carne, que fulge temblorosa y desnuda.

¡Ah, mi señora! Mírate las venas misteriosas;
boga en el agua viva que allá dentro te fluye,
y ve pasando lirios, nelumbios, lotos, rosas;

que ya verás, inquieta, junto a la fresca orilla
la dulce sombra oscura del abuelo que huye,
el que rizó por siempre tu cabeza amarilla.






Nicolás Guillén


¿Puedes?


¿Puedes venderme el aire que pasa entre tus dedos
y te golpea la cara y te despeina?
¿Tal vez podrías venderme cinco pesos de viento,
o más, quizás venderme una tormenta?
¿Acaso el aire fino
me venderías, el aire
(no todo) que recorre
en tu jardín corolas y corolas,
en tu jardín para los pájaros,
diez pesos de aire fino?

                          El aire gira y pasa
                          en una mariposa.
                          Nadie lo tiene, nadie.

¿Puedes venderme cielo,
el cielo azul a veces,
o gris también a veces,
una parcela de tu cielo,
el que compraste, piensas tú, con los árboles
de tu huerto, como quien compra el techo con la casa?
¿Puedes venderme un dólar
de cielo, dos kilómetros
de cielo, un trozo, el que tú puedas,
de tu cielo?

                          El cielo está en las nubes.
                          Altas las nubes pasan.
                          Nadie las tiene, nadie.

¿Puedes venderme lluvia, el agua
que te ha dado tus lágrimas y te moja la lengua?
¿Puedes venderme un dólar de agua
de manantial, una nube preñada,
crespa y suave como una cordera,
o bien agua llovida en la montaña,
o el agua de los charcos
abandonados a los perros,
o una legua de mar, tal vez un lago,
cien dólares de lago?

                          El agua cae, rueda.
                          El agua rueda, pasa.
                          Nadie la tiene, nadie.

¿Puedes venderme tierra, la profunda
noche de las raíces; dientes
de dinosaurios y la cal
dispersa de lejanos esqueletos?
¿Puedes venderme selvas ya sepultadas, aves muertas,
peces de piedra, azufre
de los volcanes, mil millones de años
en espiral subiendo? ¿Puedes
venderme tierra, puedes
venderme tierra, puedes?

                          La tierra tuya es mía.
                          Todos los pies la pisan.
                          Nadie la tiene, nadie.







Nicolás Guillén


viernes, febrero 23, 2018

Sugar Man


Sugar man, won't you hurry
Cause I'm tired of these scenes
For a blue coin won't you bring back
All those colors to my dreams

Silver magic ships you carry
Jumpers, coke, sweet Mary Jane
Sugar man met a false friend
On a lonely dusty road
Lost my heart when I found it
It had turned to dead black coal

Silver magic ships you carry
Jumpers, coke, sweet Mary Jane
Sugar man you're the answer
That makes my questions disappear
Sugar man cause I'm weary
Of those double games I hear
Sugar man, Sugar man, Sugar man, Sugar man
Sugar man, Sugar man, Sugar man
Sugar man, won't you hurry
Cause I'm tired of these scenes
For the blue coin won't you bring back
All those colors to my dreams

Silver magic ships you carry
Jumpers, coke, sweet Mary Jane
Sugar man met a false friend
On a lonely dusty road
Lost my heart when I found it
It had turned to dead black coal

Silver magic ships you carry
Jumpers, coke, sweet Mary Jane
Sugar man you're the answer
That makes my questions disappear






Sixto Rodriguez



Rich Folks Hoax


Baby's sleeping while its mother sighs
Talking 'bout the rich folks
Rich folks have the same jokes
And they park in basic places


The priest is preaching from a shallow grave
He counts his money, then he paints you saved
Talking to the young folks
Young folks share the same jokes
But they meet in older places


So don't tell me about your success
Nor your recipes for my happiness
Smoke in bed
I never could digest
Those illusions you claim to have going


The sun is shining, as it's always done
Coffin dust is the fate of everyone
Talking 'bout the rich folks
The poor create the rich hoax
And only late breast-fed fools believe it


So don't tell me about your success
Nor your recipes for my happiness
Smoke in bed
I never could digest
Those illusions you claim to have going

























Sixto Rodriguez



miércoles, febrero 21, 2018

A Noiseless Patient Spider


A noiseless patient spider,
I mark’d where on a little promontory it stood isolated,
Mark’d how to explore the vacant vast surrounding,
It launch’d forth filament, filament, filament, out of itself,
Ever unreeling them, ever tirelessly speeding them.

And you O my soul where you stand,
Surrounded, detached, in measureless oceans of space,
Ceaselessly musing, venturing, throwing, seeking the spheres to connect them,
Till the bridge you will need be form’d, till the ductile anchor hold,
Till the gossamer thread you fling catch somewhere, O my soul.






Walt Whitman





martes, febrero 20, 2018

For You O Democracy


Come, I will make the continent indissoluble,
I will make the most splendid race the sun ever shone upon,
I will make divine magnetic lands,
                      With the love of comrades,
                         With the life-long love of comrades.

I will plant companionship thick as trees along all the rivers of America, and along the shores of the great lakes, and all over the prairies,
I will make inseparable cities with their arms about each other’s necks,
                     By the love of comrades,
                        By the manly love of comrades.

For you these from me, O Democracy, to serve you ma femme!
For you, for you I am trilling these songs.






Walt Whitman


Acuarimántima



I

Vengo a expresar mi desazón suprema
y a perpetuarme en la virtud del canto.
Yo soy Maín, el héroe del poema,
que vio, desde los círculos del día,
regir el mundo una embriaguez y un llanto.

¡Armonía! ¡Oh profunda, oh abscóndita armonía!

Y velaré mi arduo pensamiento
sotto il velame degli versi strani,
fastuoso, de pompas seculares:
perfecta en sí la estrofa del lamento
y a impulso de los ritmos estelares.

Columpia el mar su cauda nacarina,
e imbuida en la clámide del río
esplende en bruma fúlgida la carne de la ondina.
Grana el campo nutricio, fluyen mieles,
una deidad inflama las horas con su llama,
y loa el día azul un coro de donceles.

Romero: ¿no rebosa el corazón
–por la tierra de arrugas trabajadas,
por la noche de sombras evocadas–
del tiempo y el espacio la múltiple emoción?

Brilla en las lejanías invioladas
vaga ciudad, el viento da en los juncos,
los juncos gimen bajo el viento rudo...
¡Romero, que se vierta el corazón!
Y la ternura y la tristeza mía
cantan en el crepúsculo. ¡Armonía!

Yo, rey del reino estéril de las lágrimas,
yo, rey del reino vacuo de las rimas,
con mis canciones ebrias
que un son nocturno hechiza,
y con mis voces pávidas
anuncio las cavernas del enigma.
En mis siete dolores primarios se resume,
como en alejandrino paradigma,
la escala del dolor que el mal asume.

Tenebrosa, recóndita armonía...

Mi numen fuerte no es aquel tan puro
como el cerrado corazón de un monte,
pero sobre sus ruinas de inocencia
haré brillar, ebrio del dolor puro,
una gota de luz del corazón del monte.



II

En libre vuelo el cielo de mi América
hender he visto un cóndor negro, errante...
¿Qué abismo circunscribe? ¿Qué intacta nieve augura?
Por las arterias de los ciervos montesinos
discurre para el cóndor la sangre enardecida
bajo las pieles lúcidas, entre las carnes bellas.
¡La presa viva! ¡El pico ensangrentado!
¡El ala pronta! ¡El ímpetu del vuelo!
Y un delirar de cumbres y centellas...

Así mi impulso al aura de la vida,
y así mi musa en su ilusión liviana
de que brote la carne un lirio místico.
¡Bestia de los demonios poseída,
oh carne, es hora ya del don eucarístico!
Cintila el cielo en gajos de luceros,
y querubes de vuelos melodiosos
revuelan de luceros a luceros.

Tengo la sensación de que discurro
delante de los pórticos sagrados:
alguien dice mi nombre a la distancia,
brotan dulces jardines los collados
y asumen mi ternura en su fragancia.

Claridad estelar, templo encendido,
rima errante en la noche de pavura,
huerto a la luz de Vésper. En olvido
mi ser se muere, mi canción no dura,
¿y fui no más un lúgubre alarido?

Carne, bestia, mi amiga y mi enemiga:
yo soy tú, que por leyes ominosas,
cual vano mimbre que meció una espiga
te haces nada en el polvo de las cosas...

¿Y la divina Psiquis, la rosa entre las rosas?
¿Y mis amores que irisé de lágrimas?
¿Y mi ciudad nebúlea tras la ilusión del día?
¿Y las antorchas que erigí en emblema?
¿Y esta inquietud, y este ímpetu anhelante
hacia una ley o una verdad suprema?

Pesa sobre tus pétalos, oh rosa
espiritual, tan lóbrega y cerrada
la noche, tan vacía y rencorosa,
que en vano el brillo de tu broche efunde.
Amor. Deleite. Horror. Pavesas. Nada.

¡Nada, nada por siempre! Y merecía
mi alma, por los dioses engañada,
la verdad y la ley y la armonía.
¡Sé digna de este horror y de esta nada,
y activa y valerosa, oh alma mía!



III

Como en la vaguedad de un espejismo
–¿qué sabes?– mi conciencia me interroga,
fluida en llanto entre mi propio abismo.
Y miro al mar ardiente, al monte flavo
que suaviza el azul, la estrella límpida
rielando en el rocío del capullo,
y en sus cunas los cándidos infantes,
cazados en las redes del arrullo
por el sueño de manos hechizantes.

Y vuelto a mí, gimiendo el corazón
–¿qué sabes?– vanamente me interrogo,
mudo bajo la múltiple emoción.

Sólo un saber escondo, claro y justo:
llévole como antorcha y como daga
en medio del cerrado laberinto,
en su vasta amplitud mi fe naufraga,
y hallo en su anchura incómodo recinto.

Se oyen sordos, roncos lamentos,
y alzan sus puños en el vacío
los pensamientos.

¡Oh menguado saber, pobre riqueza
de formas en imágenes trocadas,
ley ondeante, ciencia que alucina,
que cada noche en el silencio empieza,
y cada día con el sol culmina!

¡Oh menguado saber de la iracunda
vida, que ante mis ojos se renueva,
germinal y cruel, ciega y profunda,
madre de los mil partos y el misterio
que al barro humilla y a Psiquis subleva!

Como ventana que el azul del cielo
circunscribe, se entreabren los sentidos.
¡Pobre, ruin saber! Y, sin embargo,
la leve mariposa del anhelo
entra por la ventana sin rüidos.

Cuaja en el corazón de la manzana
la dulzura estival: la mariposa
vuela del fondo de la carne humana.

¡Que al claro cielo
suba el anhelo!

Por ese vuelo la heredad natía
canté con rima de ideal retorno
en la ingenua parábola temprana.
En el turquí del éter desleía
un nácar tenue mi primer mañana.

Por ese anhelo, entre los acres pinos
y las rosas en llamas del ocaso,
al hablar dejo la palabra trunca:
el tiempo es breve y el vigor escaso,
y la amada ideal no vino nunca.

Por ese anhelo en rimas balbucientes
canto el rojo camino que a la tarde
se pinta en la montaña evocadora,
o a la vívida luz del sol temprano,
como una obsesión conturbadora
de sangre y sangre en el azul lejano.

Y por él amo, en fin; y por él sueño
con una honda transfusión divina
de la luz en mi carne de tortura,
puesto que está la estrella vespertina
sobre el horror de esta prisión oscura.

Columpia el mar su cauda nacarina,
en ustorios relámpagos de espejos
esplende en bruma de ópalo la carne de la ondina,
y fulge Acuarimántima a lo lejos...



IV

Yo descendí de la antioqueña cumbre
–el alma en paz y el corazón en lumbre–
de austera estirpe que el honor decora,
y el claro sortilegio de la aurora
bruñó mi lira y la libró de herrumbre.

Y fui, viajero de nivoso monte
y umbría roza de maíz, al valle
que da a la luz su fruto entre su llama:
había miel de filtros de sinsonte
que derrama canción de rama en rama.

Y el mar abierto a mí divinamente
su honda virtud hizo afluir entera:
gusté su yodo y la embriaguez ignota
de no sé qué sagrada primavera
bajo la paz de una ciudad remota.

Fulgía en mi ilusión Acuarimántima,
ciudad de bien, fastuosa, legendaria,
ciudad de amor y esfuerzo y armonía
y de meditación y de plegaria;
una ciudad azúlea, egregia, fuerte,
una Jerusalén de poesía.

Y como los cruzados medievales
ceñíme al torso fúlgida coraza
y fuime en pos de la ciudad cautiva,
burlando la guadaña de la muerte
y la fortuna a mi querer esquiva.

La ondulante odisea rememoro
con amor y dolor: un linde vago,
de súbito sangriento, ya cetrino...
un buque, un muelle, un joven noctivago,
y el tono de la voz, y el pan marcino...

La maravilla, comba y transparente
de las noches de junio por la hondura
que un huerto viola en ácidos alcores,
y allí la levadura de mis cantos,
hecha de mezquindad y sinsabores.

Y aquella niña del amor florido,
y oloroso y ritual y enardecido,
el seno como un fruto no oprimido,
un dulzor en los besos diluido,
y un no sé qué, que túrbame el sentido.

Y la esquiva beldad, el mármol yerto
e inconmovible, y la infantina huraña
que era el postrer jazmín que daba el huerto...
Me figuro las luces de sus ojos
como dos cirios de un cariño muerto.

Y el arduo afán en el impulso vario
por resolver el canto en melodía.
Derrame un ruiseñor en el himnario
toda la miel del día.
Silencios de armonía.
Un rumor milenario,
y la luz de tu lámpara, ¡oh Sophía!

Húmedos los cabellos –cristalinos caireles
de agua y sol– aún ondulan fantásticas ondinas,
mientras danza en la luz un coro de donceles,
por la playa, al influjo de las sales marinas.



V

Turbaban mi conciencia en el precario
vivir, el ala inquieta, el viento vario,
fantasmas familiares,
misterios presentidos,
amores y cantares de jóvenes floridos,
el vino, el mar, el día en el acuario
y la mutable vocación interna:
sentir, cantar, y en raptos doloridos
“ser yo”, “no ser”, en sucesión alterna.

Árbol en plenitud, hundió mi alma
su raíz en el légamo de muerte
que nutre las corolas de la vida
y da el perfume infuso en su ramaje.
Ilusorio celaje
pide al éter sutil que lo asume,
y en el raudal fluido de las auras de abril
hace el viaje
y se consume.

¡Oh insaciedad del hálito y la nébula,
y el amor y el impulso y el anhelo!
No un dios pagano, pero sí su rastro.
No el himno divo, pero sí el suspiro.
No el mármol, mas el plinto de alabastro.
Y una sensualidad de antiguo giro.



VI

Y fui después un numen transitorio,
sombra y canción en la embriagante tierra,
un sino raro y un deleite raro.
Ya el crepúsculo estivo el día cierra,
y lejos brilla un tembloroso faro.

La dama de cabellos encendidos
fecunda con mi sangre sus huertos prohibidos.
Una inquietud frenética y gozosa
mi paz, mi sueño, mi vigor consume
y un huracán mi plenitud doblega.
Soy esa sombra que cruzó el camino,
en sangre tinta, de lujuria ciega.

Soy esa sombra pávida, cautiva
de un gran misterio en el misterio oculto.
Huella la flor azul pata lasciva
de cabrón negro, y el divino himnario
sella Satán con sellos de su culto.

Mi pena errante con mi vino loco
en el turbión del vicio la sepulto.
Soy huésped de garitos y tabernas,
disputo al puede ser un pan ingrato,
y dejo que mi carne, la ruin loba
de lúgubres anhelos arrecida,
se me abandone al logro del deleite,
desnuda en la impudicia de la vida.

Entúrbiase la clara inteligencia,
la idea afluye en nieblas ondulantes,
es el goce monótona frecuencia,
igual en el deliquio y el suspiro...
¡Dadme un beso, un contacto y una esencia,
y una sensualidad de nuevo giro!




VII

Y mi mano sacrílega se tiñe
de tu sangre. ¡oh Imali, oh vestal mía!
Mas no fue mi ternura. Fue un furor...
Si de nuevo, a mis ojos resurrecta,
te pudiese inmolar, te inmolaría.
¿Ya ves, oh Imali, que no fue mi amor?

Gozoso aún, y pávido y tremente,
huí a la sombra, la cerrada sombra
que en su mudez acoge las iras y los vértigos.
¡Un hueco en tus entrañas, tierra dura!
¡Soledad, un refugio en tus entrañas!
¡Tu ojo sin vista, lobreguez impura!

Mas la sangre fluía en chorros de carbunclos.
Ante el cadáver lívido, sin blandones, sin túmulo,
todo estaba sangriento.
“¡Asesino!”, “¡Asesino!”, susurraba y se iba el viento.
En los prados del monte fueron crimen mis huellas.
Como vírgenes desoladas
me bañaron de llanto las estrellas.
En las playas de luz mojadas
di un alarido al ver la mar que hervía,
y huyendo en pos, en pos de la noche que huía,
me ensangrentó la horrible sangre del alba del día.

“¡Asesino!” “¡Asesino!”,
susurraba y se iba el viento.

Y los pastores me negarían sus cabañas.
Las rocas me aniquilarían en sus entrañas.
La vida es mi enemigo violento
y el amor mi enemigo sanguinario.
¿Y a qué tu sombra, oh noche del lúbrico ardimiento,
si entre mi corazón ardía el tenebrario?

Viajó mi alma en íntimas pasiones
de cristos coronados de congojas.
¡El pudor, el honor entre sayones!
Del vicio en las ocultas floraciones
fui rosa negra entre mil rosas rojas.

Mas el azul a mi dolor heroico
abrió su abismo de fulgencias puras,
soles remotos, nébulas, centellas,
y estuve opreso por la lumbre de ellas
del hilo de oro del collar del día.
Un anhelar de espacio dio sus alas
a mi desconcertada poesía.

En la lluvia de gotas de mi sangre,
tras el velo irisado de mis lágrimas,
vago sueño sus brumas deshacía,
vago sueño –mi vaga Acuarimántima.




VIII

Retorno de tal sueño hacia la playa,
realizado mi afán. La tierra invoca
su ley, que mis empeños desvirtúa.
Oigo el grito del mar que me penetra,
y ansia de paz perenne me extenúa.

¡El mar, el mar, el mar ambiguo y fuerte!
Su espuma brinda a mi ruindad su imperio
en astillas de mástiles fallidos.
Ráfagas de misterio...
Monstruos desconocidos...

¿No brilla entre la niebla Acuarimántima?
¿No se oye limpia, fúlgida canción
sonar, aletargar el corazón
y pasar?

¡No se oye nada...!

Silencio y bruma, soplos de lo arcano.
La luz mentira, la canción mentira.
Sólo el rumor de un vago viento vano
volando en los velámenes expira.

La noche adviene, de mortuorio emblema.
Retumba en mi recuerdo mi alarido,
mi estéril tiempo en mi inquietud suprema.
El trágico dolor ha concluido.
Yo soy Maín, el héroe del poema...

Florece el cielo en gajos de luceros,
y querubes de vuelos melodiosos
revuelan de luceros a luceros.

Y no decir, y no tener palabras
tan llenas de tu goce vespertino
y tu sueño nupcial, ¡oh campesino
que cruzas con tus carros rechinantes!
En tu ilusión un hálito divino
te ha poblado de niños los instantes.

Y ver, desde esta cima de ternura
y valeroso amor, en toda cosa
el enigma, el enigma inviolado.
Arde la pura rosa, sueña la linfa pura,
¡oh carne!, y tú destilas el pecado
y... y...

¡El enigma, por siempre inviolado!

Y por toda verdad, saber ahora
que brilla el mar, que el monte se estremece,
que fulge Sirio en el jardín lejano,
y que al frustrarse el giro de mi vida,
al giro de la suya grana el grano.

La luz mentira. La canción mentira.

Que fui por los instintos inmolado
ante el ara de un dios; que un soplo frío
de lóbrego misterio he suscitado;
que un dolor nuevo está en el plectro mío,
y el canto en el dolor purificado.

Lúgubre viento sopla entre los juncos,
los juncos gimen bajo el viento rudo.

Cantan en el crepúsculo a lo lejos...



IX

Honda, inmóvil, letárgica laguna
que semeja el sepulcro de la luna,
se tiende hasta el ilímite horizonte,
y a la tristeza vesperal se aduna
un viento de ultramar y de ultramonte.

Cantan en el crepúsculo
y un ledo son de esquilas
vuela en el éter trémulo.

Que mi rumor se extinga, blando, tenue,
ola en onda, onda en pompa, pompa en iris,
como vágulo aroma en la memoria,
y me reintegre a la epopeya trunca
en la ciudad de nieblas de mi gloria.

Cantan en el crepúsculo... ¡Armonía!

Y que olvide la brega transitoria,
y el no ser más –y el no ser menos nunca–
del hilo de oro del collar del día.

¡Armonía! ¡Armonía!

Y el ancla suelte a místicas regiones,
no humano ya mi desear: divino
mi poseer,
mientras en el desmayo del crepúsculo
rueda sobre los ásperos terrones
el carro campesino,
y fulgura, real, velada por mis lágrimas,
erigida por mi dolor con los mármoles de mi poesía,
mi nebúlea, azulina Acuarimántima!

¡Armonía! ¡Armonía!




Acuarimántima & Pabellón de Palabras & Porfirio Barba Jacob



Porfirio Barba Jacob