lunes, marzo 05, 2018

Cresta


Cuando mueren
por un instante
las palabras
que tanta muerte dan siempre a la vida
cuando descubrimos el actor que somos
y lo exponemos
despojado de sus trajes crepusculares
cuando nos despierta el sueño de soñar
o arrancados del sueño
despertamos atónitos
como extraño celeste caído
cuando se quiebran los espejos
al soplo de una necesidad desconocida
cuando vaciadas quedan las odres
y sea aquieta la fiera de la sed
cuando se acepta el desierto por jardín
brota del resplandeciente vacío
una repentina cresta
y el levante impera en ella
filo puro neto
neutro
que se abate
y nos degüella.







Juan Liscano


domingo, marzo 04, 2018

La Question Se Pose De...


Ce qui est grave
est que nous savons
qu’après l’ordre
de ce monde
il y en a un autre.

Quel est-il?

Nous ne le savons pas.

Le nombre et l’ordre des suppositions possibles
dans ce domaine
est justement
l’infini!

Et qu’est-ce que l’infini?

Au juste nous ne le savons pas!

C’est un mot
dont nous nous servons
pour indiquer
l’ouverture
de notre conscience
vers la possibilité
démesurée,
inlassable et démesurée.

Et qu’est-ce au juste que la conscience?

Au juste nous ne le savons pas.

C’est le néant.

Un néant
dont nous nous servons
pour indiquer
quand nous ne savons pas quelque chose
de quel côté
nous ne le savons
et nous disons
alors
conscience,
du côté de la conscience,
mais il y a cent mille autres côtés.

Et alors?

Il semble que la conscience
soit en nous
liée
au désir sexuel
et à la faim;

mais elle pourrait
très bien
ne pas leur être
liée.

On dit,
on peut dire,
il y en a qui disent
que la conscience
est un appétit,
l’appétit de vivre;

et immédiatement
à côté de l’appétit de vivre,
c’est l’appétit de la nourriture
qui vient immédiatement à l’esprit;

comme s’il n’y avait pas de gens qui mangent
sans aucune espèce d’appétit;
et qui ont faim.

Car cela aussi
existe
d’avoir faim
sans appétit;

et alors?


Alors
l’espace de la possibilité
me fut un jour donné
comme un grand pet
que je ferai;
mais ni l’espace,
ni la possibilité,
je ne savais au juste ce que c’était,

et je n’éprouvais pas le besoin d’y penser,

c’étaient des mots
inventés pour définir des choses
qui existaient
ou n’existaient pas
en face de
l’urgence pressante
d’un besoin:
celui de supprimer l’idée,
l’idée et son mythe,
et de faire régner à la place
la manifestation tonnante
de cette explosive nécessité:
dilater le corps de ma nuit interne,

du néant interne
de mon moi

qui est nuit,
néant,
irréflexion,

mais qui est une explosive affirmation
qu’il y a
quelque chose
à quoi faire place:
mon corps.

Et vraiment
le réduire à ce gaz puant,
mon corps?
Dire que j’ai un corps
parce que j’ai un gaz puant
qui se forme
au dedans de moi?

Je ne sais pas
Mais
je sais que

l’espace,
le temps,
la dimension,
le devenir,
le futur,
l’avenir,
l’être,
le non-être,
le moi,
le pas moi,

ne sont rien pour moi;

mais il y a une chose
qui est quelque chose,
une seule chose
qui soit quelque chose,
et que je sens
à ce que ça veut
SORTIR:
la présence
de ma douleur
de corps,

la présence
menaçante,
jamais lassante
de mon
corps;

si fort qu’on me presse de questions
et que je nie toutes les questions,
il y a un point
où je me vois contraint
de dire non,

NON

alors
à la négation;

et ce point
c’est quand on me presse,

quand on me pressure
et qu’on me trait
jusqu’au départ
en moi
de la nourriture,
de ma nourriture
et de son lait,
et qu’est-ce qui reste?

Que je suis suffoqué;
et je ne sais pas si c’est une action
mais en me pressant ainsi de questions
jusqu’à l’absence
et au néant
de la question
on m’a pressé
jusqu’à la suffocation
en moi
de l’idée de corps
et d’être un corps,

et c’est alors que j’ai senti l’obscène

et que j’ai pété
de déraison
et d’excès
et de la révolte
de ma suffocation.

C’est qu’on me pressait
jusqu’à mon corps
et jusqu’au corps

et c’est alors
que j’ai tout fait éclater
parce qu’à mon corps
on ne touche jamais.













Antonin Artaud

Lettre Aux Médecins Chefs Des Asiles De Fous


Messieurs,

Les lois, la coutume vous concèdent le droit de mesurer l'esprit. Cette juridiction souveraine, redoutable, c'est avec votre entendement que vous l'exercez. laissez-nous rire. la crédulité des peuples civilisés, des savants, des gouvernements pare la psychiatrie d'on ne sait quelles lumières surnaturelles. Le procès de votre profession est jugé d'avance. Nous n'entendons pas discuter ici la valeur de votre science, ni l'existence douteuse des maladies mentales. Mais, pour cent pathogénies prétentieuses où se déchaîne la confusion de la matière et de l'esprit, pour cent classifications dont les plus vagues sont encore les plus utilisables, combien de tentatives nobles pour approcher le monde cérébral où vivent tant de vos prisonniers? Combien êtes-vous par exemple, pour qui le rêve du dément précoce, les images dont il est la proie sont autre chose qu'une salade de mots?

Nous ne nous étonnons pas de vous trouver inférieurs à une tâche pour laquelle il n'y a que peu de prédestinés. Mais nous nous élevons contre le droit attribué à des hommes, bornés ou non, de sanctionner par l'incarcération perpétuelle leurs investigations dans le domaine de l'esprit.
Et quelle incarcération! On sait - on ne sait pas assez- que les asiles, loin d'être des asiles, sont d'effroyables geôles, où les détenus fournissent une main-d'œuvre gratuite et commode, où les sévices sont la règle, et cela est toléré par vous. L'asile d'aliénés, sous le couvert de la justice, est comparable à la caserne, à la prison, au bagne.

Nous ne soulèverons pas ici la question des internements arbitraires, pour vous éviter la peine de dénégations faciles. Nous affirmons qu'un grand nombre de vos pensionnaires, parfaitement fous selon la définition officielle, sont eux aussi, arbitrairement internés. Nous n'admettons pas qu'on entrave le libre développement d'un délire, aussi légitime, aussi logique que toute autre succession d'idées ou d'actes humains. La répression des réactions antisociales est aussi chimérique qu'inacceptable en son principe. Tous les actes individuels sont antisociaux. Les fous sont les victimes individuelles par excellence de la dictature sociale ; au nom de cette individualité qui est le propre de l'homme, nous réclamons qu'on libère ces forçats de la sensibilité puisque aussi bien il n'est pas au pouvoir des lois d'enfermer tous les hommes qui pensent et agissent.

Sans insister sur le caractère parfaitement génial des manifestations de certains fous, dans la mesure où nous sommes aptes à les apprécier, nous affirmons la légitimité absolue de leur conception de la réalité, et de tous les actes qui en découlent.

Puissiez-vous vous en souvenir demain matin à l'heure de la visite, quand vous tenterez sans lexique de converser avec ces hommes sur lesquels, reconnaissez-le, vous n'avez d'avantage que celui de la force.



De: Hombre Mirando Al Sudeste


Antonin Artaud


sábado, marzo 03, 2018

Lettre Aux Recteurs Des Universités Européennes


Monsieur le Recteur,

Dans la citerne étroite que vous appellez «Pensée», les rayons spirituels pourrissent comme de la paille. Assez de jeu de langue, d’artifices de syntaxe, de jongleries de formules, il y a à trouver maintenant la grande Loi du cœur, la Loi qui ne soit pas une loi, une prison, mais un guide pour l’Esprit perdu dans son propre labyrinthe. Plus loin que ce que la science pourra jamais toucher, là ou les faisceaux de la raison se brisent contre les nuages, ce labyrinthe existe, point central ou convergent toutes les forces de l’être, les ultimes nervures de l’esprit. Dans ce dédale de murailles mouvantes et toujours déplacées, hors de toutes formes connues de pensée, notre Esprit se meut, épiant ses mouvements les plus secrets et spontanés, ceux qui ont un caractère de révélation, cet air venu d’ailleurs, tombé du ciel.

Mais la race des prophètes s’est éteinte. L’Europe se cristallise, se momifie lentement sous les bandelettes de ses frontières, de ses usines, de ses tribunaux, de ses universités. L’Esprit gelé craque entre les ais minéraux qui se resserrent sur lui. La faute en est à vos systèmes moisis, à votre logique de 2 et 2 font 4, la faute en est à vous, Recteurs, pris au filet des syllogismes. Vous fabriquez des ingénieurs, des magistrats, des médecins à qui échappent les vrais mystères du corps, les lois cosmiques de l’être, de faux savants aveugles dans l’outre-terre, des philosophes qui prétendent à reconstruire l’Esprit. Le plus petit acte de création spontanée est un monde plus complexe et plus révélateur qu’une quelconque métaphysique. Laissez-nous donc, Messieurs, vous n’êtes que des usurpateurs. De quel droit prétendez-vous canaliser l’intelligence, décerner des brevets d’esprit? Vous ne savez rien de l’Esprit, vous ignorez ses ramifications les plus cachées et les plus essentielles, ces empreintes fossiles si proches des sources de nous-mêmes, ces traces que nous parvenons parfois à relever sur les gisements les plus obscurs de nos cerveaux.

Au nom même de votre logique, nous vous disons: la vie pue, Messieurs. Regardez un instant vos faces, considérez vos produits. À travers le crible de vos diplômes, passe une jeunesse efflanquée, perdue. Vous êtes la plaie d’un monde, Messieurs, et c’est tant mieux pour ce monde, mais qu’il se pense un peu moins à la tête de l’humanité.






Antonin Artaud


jueves, marzo 01, 2018

Black Bandillera


The flower of a fighting toro
is mourning, affixed since birth.
The path of a fighting toro
is the arena, and later the scales.
If condemned by nature
to death by the sword,
remember-the shrewd cowardice of the fox
for the bull is not ceremony.
No way out, old chap.
One must die properly.
One must die excellently
to intimidate enemies.
After the fight all the same
someone by custom
will mark a sign with chalk:
'Such and such number of kilograms.'
A carcass goes by kilograms.
Courage is measured in grams.
A carcass goes for meat.
Courage goes against the pricks.
It’s foolish to be daring, if
it’s immaturity of the mind.
It’s foolish to be a coward, if
you’re surrounded anyway.
Why fuss in the arena?
You’re a fine little bull.
Why pretend to be lame?
Your legs are still strong.
Hey, you clumsy malingerer...
Some were stronger than you-
in the end they divide up everyone
on hooks in the meat shop.
Fling yourself shabbily to meet
the hungering band-or else
for the crowd’s pleasure
the slippery bandilleros will thrust
black banderillas,
black banderillas
like flares of shame,
into the nape of your neck.
Fool, what’s there for you to win
in a miserable game with rogues? !
Those afraid of the fight
are not suited for the corrida.
Scraggy, streetwalker-cows
will lure you from the arena
with delicate little bells,
well, and then under the knife.
Since it all ends anyway,
let it end in a sweat.
Let the butchers’ ballet dancers
huff and puff and dance.
Be a real toro!
Don’t lower yourself to the level
of this crowd made up of
nothing but cowardly bulls.
Have they given many grams
of courage to the world?
And the black banderillas,
the black banderillas
graze the walls,
blinds, and door frames,
plunged into jackets
like trembling skin.






Yevgeny Yevtushenko


miércoles, febrero 28, 2018

Me gustaría...


Me gustaría
                            nacer en todos los países,
tener un pasaporte
                            para todos
que provoque el pánico de las cancillerías;
ser cada pez
                            en cada océano
y cada perro
                            en las calles del mundo.
No quiero arrodillarme
                            ante ídolo alguno
ni hacer el papel
                            de un ruso ortodoxo hippie,
pero me gustaría
                            hundirme
                            en lo más hondo del Lago Baikal
y salir resoplando
                            en otras aguas,
                            ¿por qué no en las del Mississippi?

En mi maldito universo amado
                             me gustaría
ser una hierba humilde,
                             nunca un Narciso delicado
que se besa
                             en el espejo.
Me gustaría ser
                             cualquiera de las criaturas de Dios,
incluso la última hiena sarnosa,
pero nunca un tirano,
                             ni siquiera el gato de un tirano.
Me gustaría
                             reencarnar como hombre
                                         en cualquier imagen:
víctima de una cárcel de tortura,
                             un niño vagabundo en los tugurios de Hong Kong ,
un esqueleto viviente en Bangladesh,
                             un pordiosero sagrado en el Tíbet,
un negro de Ciudad del Cabo,
pero nunca encarnar
                              la imagen de Rambo.
Sólo odio a los hipócritas,
                              hienas sazonadas en espesa melaza.
Me gustaría tenderme
                              bajo el bisturí de todos los cirujanos del mundo,
ser un tullido, un ciego,
                              sufrir todo mal, toda deformidad y herida,
ser un mutilado de guerra,
                              o el que recoge las colillas del suelo,
con tal de que no las penetre
                              el infame microbio de la prepotencia.
No quisiera formar parte de la élite,
                               ni, por supuesto, del rebaño de cobardes,
ni perro de manada,
                               ni pastor servil al abrigo de su rebaño.
Y quisiera ser feliz,
                               pero no a costa de los infelices.
Y quisiera ser libre,
                               pero no a costa de los que no lo son.
Quisiera amar
                               a todas las mujeres del mundo,
y ser también una mujer
                               sólo una vez...

La madre naturaleza ha menospreciado al hombre.
¿Por qué no lo hizo capaz de ser madre?
Si se agitara un niño
                               bajo su corazón,
acaso el hombre
                               sería menos cruel.
Quisiera ser el pan de cada día,
digamos,
                               ser la taza de arroz
                               de la sufriente madre vietnamita,
el vino barato
                               en las tabernas de los obreros napolitanos,
o el tubito de queso
                               en la órbita lunar.
Que me coman
                               que me beban,
                                                  dejadme ser útil
                                                                            en la muerte.

Quisiera pertenecer a todas las edades,
                                atolondrar la historia
                                            y atontarla con mis travesuras.
Quisiera llevarle a Nefertiti
                                en una troika á Pushkin.
Quisiera multiplicar
                                cien veces el espacio de un instante
para que al mismo tiempo
                                pueda beber vodka con los pescadores siberianos,
y junto a Homero,
                                        Dante,
                                                           Shakespeare
                                                                                      y Tolstoi
sentarme a beber cualquier cosa,
                                salvo, por supuesto,
                                                                          Coca-Cola.
Y bailar al ritmo de los tam-tam en el Congo,
estar en huelga en Renault,
jugar a la pelota con los muchachos brasileños
                                en la playa de Copacabana.

Quisiera hablar todas las lenguas,
                                como las aguas ocultas bajo la tierra,
y hacer todo tipo de trabajo de una vez.
                                Me aseguraría
                de que sólo fue poeta un Yevtushenko,
                                el otro un clandestino
                                                                    en alguna parte,
no puedo decir dónde
                                por razones de seguridad.
El tercero, un estudiante en Berkeley,
                                 y el cuarto un entusiasta huaso chileno.
El quinto sería tal vez
                                 un maestro de niños esquimales en Alaska,
el sexto
                un joven presidente
                                 en cualquier parte, modestamente digamos Sierra Leona,
el séptimo
               podría entretenerse en la cuna con un sonajero,
y el décimo,
                           el centésimo,
                                                          el millonésimo...
Para mí, ser yo mismo no es bastante,
                                ¡dejadme ser todo el mundo!
Estaré en miles de ejemplares hasta mi último día
                                para que la tierra vibre conmigo
y las computadoras enloquezcan
                                procesando mi censo universal.
Quisiera combatir en todas tus barricadas,
humanidad,
y morir cada noche
                               como una luna exhausta,
y amanecer cada día
                               como sol recién nacido
con una suave mancha inmortal
                               en la cabeza.
Y cuando muera,
un Francois Villon siberiano,
                               que no descanse mi cuerpo
                               ni en la tierra francesa,
                                                 ni italiana,
sino en la tierra rusa, amarga,
                               en una colina verde,
donde por vez primera
                               me sentí todo el mundo.









Yevgeny Yevtushenko




*Poema escrito originalmente en español


lunes, febrero 26, 2018

Cotidiano

(Português)


Todo dia ela faz tudo sempre igual

Me sacode às seis horas da manhã
Me sorri um sorriso pontual
E me beija com a boca de hortelã

Todo dia ela diz que é pra eu me cuidar
E essas coisas que diz toda mulher
Diz que está me esperando pro jantar
E me beija com a boca de café 

Todo dia eu só penso em poder parar
Meio-dia eu só penso em dizer não
Depois penso na vida prá levar
E me calo com a boca de feijão

Seis da tarde, como era de se esperar
Ela pega e me espera no portão
Diz que está muito louca prá beijar
E me beija com a boca de paixão

Toda noite ela diz prá eu não me afastar
Meia-noite ela jura eterno amor
Me aperta prá eu quase sufocar
E me morde com a boca de pavor






Chico Buarque


Cotidiano

(Español)


Cada día ella siempre hace todo igual

Me despierta a las seis antes que el sol
Me sonrie con sonrisa puntual
Y me besa con boca de mentol

Todo el día ella dice "te has de cuidar"
Cosas que dice siempre una mujer
Dice que está esperándome a almorzar
Y me besa con boca de café

Todo el día yo pienso en poder parar
Al mediodía pienso en decir no
Luego pienso en la vida y continuar
Y me callo con boca de arroz

En la tarde, a las seis, era de esperar
Ella viene y me espera en el portón
Dice estar como loca por besar
Y me besa con boca de pasión

Cada noche me pide a su lado estar
Medianoche y me jura eterno amor
Y me aprieta hasta hacerme sofocar
Y me besa con boca de pavor







Chico Buarque




domingo, febrero 25, 2018

¡Danza, Mulata!


Danza, mulata, danza,
mientras canta
en el tambor de los abuelos
el son languidecente de la raza.


Alza tus manos ágiles
para apresar el aire,
envuélvete en tu cuerpo
de rugiente deseo,
donde late la queja de las gaitas
bajo el ardor de tu broncínea carne.

Deja que el sol fustigue
tu belleza demente,
que corra por tus flancos inquietantes
el ritmo que tus senos estremece.

Aprisiona en tu talle atormentado
esa música bruja
que acompasa la voz de la canción.

¡Danza, mulata, danza!
En tus piernas veloces y en el son
que ha empapado tus lúbricas caderas
doscientos siglos se agazapan.

¡Danza, mulata, danza!
Tú y yo sentimos en la sangre
galopar el incendio de una misma nostalgia.





Jorge Artel



sábado, febrero 24, 2018

El Abuelo


Esta mujer angélica de ojos septentrionales,
que vive atenta al ritmo de su sangre europea,
ignora que en lo hondo de ese ritmo golpea
un negro el parche duro de roncos atabales.

Bajo la línea escueta de su nariz aguda,
la boca, en fino trazo, traza una raya breve,
y no hay cuervo que manche la solitaria nieve
de su carne, que fulge temblorosa y desnuda.

¡Ah, mi señora! Mírate las venas misteriosas;
boga en el agua viva que allá dentro te fluye,
y ve pasando lirios, nelumbios, lotos, rosas;

que ya verás, inquieta, junto a la fresca orilla
la dulce sombra oscura del abuelo que huye,
el que rizó por siempre tu cabeza amarilla.






Nicolás Guillén


¿Puedes?


¿Puedes venderme el aire que pasa entre tus dedos
y te golpea la cara y te despeina?
¿Tal vez podrías venderme cinco pesos de viento,
o más, quizás venderme una tormenta?
¿Acaso el aire fino
me venderías, el aire
(no todo) que recorre
en tu jardín corolas y corolas,
en tu jardín para los pájaros,
diez pesos de aire fino?

                          El aire gira y pasa
                          en una mariposa.
                          Nadie lo tiene, nadie.

¿Puedes venderme cielo,
el cielo azul a veces,
o gris también a veces,
una parcela de tu cielo,
el que compraste, piensas tú, con los árboles
de tu huerto, como quien compra el techo con la casa?
¿Puedes venderme un dólar
de cielo, dos kilómetros
de cielo, un trozo, el que tú puedas,
de tu cielo?

                          El cielo está en las nubes.
                          Altas las nubes pasan.
                          Nadie las tiene, nadie.

¿Puedes venderme lluvia, el agua
que te ha dado tus lágrimas y te moja la lengua?
¿Puedes venderme un dólar de agua
de manantial, una nube preñada,
crespa y suave como una cordera,
o bien agua llovida en la montaña,
o el agua de los charcos
abandonados a los perros,
o una legua de mar, tal vez un lago,
cien dólares de lago?

                          El agua cae, rueda.
                          El agua rueda, pasa.
                          Nadie la tiene, nadie.

¿Puedes venderme tierra, la profunda
noche de las raíces; dientes
de dinosaurios y la cal
dispersa de lejanos esqueletos?
¿Puedes venderme selvas ya sepultadas, aves muertas,
peces de piedra, azufre
de los volcanes, mil millones de años
en espiral subiendo? ¿Puedes
venderme tierra, puedes
venderme tierra, puedes?

                          La tierra tuya es mía.
                          Todos los pies la pisan.
                          Nadie la tiene, nadie.







Nicolás Guillén


viernes, febrero 23, 2018

Sugar Man


Sugar man, won't you hurry
Cause I'm tired of these scenes
For a blue coin won't you bring back
All those colors to my dreams

Silver magic ships you carry
Jumpers, coke, sweet Mary Jane
Sugar man met a false friend
On a lonely dusty road
Lost my heart when I found it
It had turned to dead black coal

Silver magic ships you carry
Jumpers, coke, sweet Mary Jane
Sugar man you're the answer
That makes my questions disappear
Sugar man cause I'm weary
Of those double games I hear
Sugar man, Sugar man, Sugar man, Sugar man
Sugar man, Sugar man, Sugar man
Sugar man, won't you hurry
Cause I'm tired of these scenes
For the blue coin won't you bring back
All those colors to my dreams

Silver magic ships you carry
Jumpers, coke, sweet Mary Jane
Sugar man met a false friend
On a lonely dusty road
Lost my heart when I found it
It had turned to dead black coal

Silver magic ships you carry
Jumpers, coke, sweet Mary Jane
Sugar man you're the answer
That makes my questions disappear






Sixto Rodriguez



Rich Folks Hoax


Baby's sleeping while its mother sighs
Talking 'bout the rich folks
Rich folks have the same jokes
And they park in basic places


The priest is preaching from a shallow grave
He counts his money, then he paints you saved
Talking to the young folks
Young folks share the same jokes
But they meet in older places


So don't tell me about your success
Nor your recipes for my happiness
Smoke in bed
I never could digest
Those illusions you claim to have going


The sun is shining, as it's always done
Coffin dust is the fate of everyone
Talking 'bout the rich folks
The poor create the rich hoax
And only late breast-fed fools believe it


So don't tell me about your success
Nor your recipes for my happiness
Smoke in bed
I never could digest
Those illusions you claim to have going

























Sixto Rodriguez



miércoles, febrero 21, 2018

A Noiseless Patient Spider


A noiseless patient spider,
I mark’d where on a little promontory it stood isolated,
Mark’d how to explore the vacant vast surrounding,
It launch’d forth filament, filament, filament, out of itself,
Ever unreeling them, ever tirelessly speeding them.

And you O my soul where you stand,
Surrounded, detached, in measureless oceans of space,
Ceaselessly musing, venturing, throwing, seeking the spheres to connect them,
Till the bridge you will need be form’d, till the ductile anchor hold,
Till the gossamer thread you fling catch somewhere, O my soul.






Walt Whitman





martes, febrero 20, 2018

For You O Democracy


Come, I will make the continent indissoluble,
I will make the most splendid race the sun ever shone upon,
I will make divine magnetic lands,
                      With the love of comrades,
                         With the life-long love of comrades.

I will plant companionship thick as trees along all the rivers of America, and along the shores of the great lakes, and all over the prairies,
I will make inseparable cities with their arms about each other’s necks,
                     By the love of comrades,
                        By the manly love of comrades.

For you these from me, O Democracy, to serve you ma femme!
For you, for you I am trilling these songs.






Walt Whitman