Clou mon frère fou, ils t'ont enfermé parce qu'un soir, à force de désespoir, dans l'eau tu as voulu te jeter. Depuis ce temps-là, Clou mon frère, ils t'ont interné pour te soigner, pour t'enlever le goût du suicide, pour te redonner le goût du social qui toujours doit être rentable ; depuis ce jour, ce jour où ils ont pris la décision de t'enfermer, afin de surveiller les pulsions qui t'incitent au suicide, depuis ce jour-là, Clou mon frère de démence, Clou l'étrange, Clou l'étranger, Clou le percé, Clou le persécuté, Clou le trompé, Clou le torturé, Clou le mutilé, Clou l'immense ! Depuis ce jour-là, ils ont cherché à faire de ton suicide sincère une captivité atroce. Clou mon frère, ils t'ont sauvé de la noyade dans le but peu avouable de hisser entre toi et la vie d'énormes palissades. Clou mon frère fou, tu es enfermé dans l'univers concentrationnaire, tu es parqué comme une bête étrange. Clou mon frère fou, si de ce troupeau parqué tu sens de te détacher, même si pour cela ta laine de mouton doit s'imprégner de sang rouge, et faire tache parmi la fadeur blanche constituée par des êtres en blouses qui vers rien ne penchent ; Clou mon frère fou, ne sois pas avare de ton sang, parce que si avec ton cœur tu t'entêtes, il se pourrait bien qu'un jour tu te transformes en bélier dont la robe de pourpre et d'or serait comme un hommage rendu à chaque Aurore.
Mais, Clou mon frère fou, je sais bien que la comparaison avec le bétail ne finira pas sur le sublime détail que mon être venu de l'extérieur, projetait ; je sais bien, Clou mon frère fou, qu'un jour aux abattoirs, à l'aide de pilules, de piqûres et d'ondes électriques, ils finiront par conduire ta carcasse pourtant unique.
Clou mon frère fou, même si tout ton être a peur de cette mort, songe, songe à ta capacité instinctuelle qui te fait rendre un hommage toujours actuel aux Aurores pleines et inhabituelles.