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domingo, febrero 12, 2017

Mauvais Sang





J'ai de mes ancêtres gaulois l'oeil bleu blanc, la cervelle étroite, et la maladresse dans la lutte. Je trouve mon habillement aussi barbare que le leur. Mais je ne beurre pas ma chevelure.



Les Gaulois étaient les écorcheurs de bêtes, les brûleurs d'herbes les plus ineptes de leur temps.

D'eux, j'ai: l'idolâtrie et l'amour du sacrilège; - Oh! tous les vices, colère, luxure, - magnifique, la luxure; - surtout mensonge et paresse.

J'ai horreur de tous les métiers. Maîtres et ouvriers, tous paysans, ignobles. La main à plume vaut la main à charrue. - Quel siècle à mains! - Je n'aurai jamais ma main. Après, la domesticité mène trop loin. L'honnêteté de la mendicité me navre. Les criminels dégoûtent comme des châtrés : moi, je suis intact, et ça m'est égal.

Mais! qui a fait ma langue perfide tellement qu'elle ait guidé et sauvegardé jusqu'ici ma paresse? Sans me servir pour vivre même de mon corps, et plus oisif que le crapaud, j'ai vécu partout. Pas une famille d'Europe que je ne connaisse. - J'entends des familles comme la mienne, qui tiennent tout de la déclaration des Droits de l'Homme. - J'ai connu chaque fils de famille !

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Si j'avais des antécédents à un point quelconque de l'histoire de France!

Mais non, rien.

Il m'est bien évident que j'ai toujours été race inférieure. Je ne puis comprendre la révolte. Ma race ne se souleva jamais que pour piller: tels les loups à la bête qu'ils n'ont pas tuée.

Je me rappelle l'histoire de la France fille aînée de l'Église. J'aurai fait, manant, le voyage de terre sainte, j'ai dans la tête des routes dans les plaines souabes, des vues de Byzance, des remparts de Solyme; le culte de Marie, l'attendrissement sur le crucifié s'éveillent en moi parmi les mille féeries profanes. - Je suis assis, lépreux, sur les pots cassés et les orties, au pied d'un mur rongé par le soleil. - Plus tard, reître, j'aurais bivaqué sous les nuits d'Allemagne.

Ah! encore: je danse le sabat dans une rouge clairière, avec des vieilles et des enfants.

Je ne me souviens pas plus loin que cette terre-ci et le christianisme. Je n'en finirais pas de me revoir dans ce passé. Mais toujours seul; sans famille; même, quelle langue parlais-je? Je ne me vois jamais dans les conseils du Christ; ni dans les conseils des Seigneurs, - représentants du Christ.

Qu'étais-je au siècle dernier: je ne me retrouve qu'aujourd'hui. Plus de vagabonds, plus de guerres vagues. La race inférieure a tout couvert - le peuple, comme on dit, la raison; la nation et la science.

Oh! la science! On a tout repris. Pour le corps et pour l'âme, - le viatique, - on a la médecine et la philosophie, - les remèdes de bonnes femmes et les chansons populaires arrangées. Et les divertissements des princes et les jeux qu'ils interdisaient! Géographie, cosmographie, mécanique, chimie!...

La science, la nouvelle noblesse! Le progrès. Le monde marche! Pourquoi ne tournerait-il pas?

C'est la vision des nombres. Nous allons à l'Esprit. C'est très certain, c'est oracle, ce que je dis. Je comprends, et ne sachant m'expliquer sans paroles païennes, je voudrais me taire.

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Le sang païen revient! L'esprit est proche, pourquoi Christ ne m'aide-t-il pas, en donnant à mon âme noblesse et liberté. Hélas! l'Évangile a passé! l'Évangile! l'Évangile.

J'attends Dieu avec gourmandise. Je suis de race inférieure de toute éternité.

Me voici sur la plage armoricaine. Que les villes s'allument dans le soir. Ma journée est faite; je quitte l'Europe. L'air marin brûlera mes poumons; les climats perdus me tanneront. Nager, broyer l'herbe, chasser, fumer surtout; boire des liqueurs fortes comme du métal bouillant, - comme faisaient ces chers ancêtres autour des feux.

Je reviendrai, avec des membres de fer, la peau sombre, l'oeil furieux: sur mon masque, on me jugera d'une race forte. J'aurai de l'or: je serai oisif et brutal. Les femmes soignent ces féroces infirmes retour des pays chauds. Je serai mêlé aux affaires politiques. Sauvé.

Maintenant je suis maudit, j'ai horreur de la patrie. Le meilleur, c'est un sommeil bien ivre, sur la grève.

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On ne part pas. - Reprenons les chemins d'ici, chargé de mon vice, le vice qui a poussé ses racines de souffrance à mon côté, dès l'âge de raison - qui monte au ciel, me bat, me renverse, me traîne.

La dernière innocence et la dernière timidité. C'est dit. Ne pas porter au monde mes dégoûts et mes trahisons.

Allons! La marche, le fardeau, le désert, l'ennui et la colère.

À qui me louer? Quelle bête faut-il adorer? Quelle sainte image attaque-t-on? Quels coeurs briserai-je? Quel mensonge dois-je tenir? - Dans quel sang marcher?

Plutôt, se garder de la justice. - La vie dure, l'abrutissement simple, - soulever, le poing desséché, le couvercle du cercueil, s'asseoir, s'étouffer. Ainsi point de vieillesse, ni de dangers : la terreur n'est pas française.

- Ah! je suis tellement délaissé que j'offre à n'importe quelle divine image des élans vers la perfection.

O mon abnégation, ô ma charité merveilleuse! ici-bas, pourtant!

De profundis Domine, suis-je bête!

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Encore tout enfant, j'admirais le forçat intraitable sur qui se referme toujours le bagne; je visitais les auberges et les garnis qu'il aurait sacrés par son séjour; je voyais avec son idée le ciel bleu et le travail fleuri de la campagne; je flairais sa fatalité dans les villes. Il avait plus de force qu'un saint, plus de bon sens qu'un voyageur - et lui, lui seul! pour témoin de sa gloire et de sa raison.

Sur les routes, par des nuits d'hiver, sans gîte, sans habits, sans pain, une voix étreignait mon coeur gelé: "Faiblesse ou force: te voilà, c'est la force. Tu ne sais ni où tu vas ni pourquoi tu vas, entre partout, réponds à tout. On ne te tuera pas plus que si tu étais cadavre." Au matin j'avais le regard si perdu et la contenance si morte, que ceux que j'ai rencontrés ne m'ont peut-être pas vu.

Dans les villes la boue m'apparaissait soudainement rouge et noire, comme une glace quand la lampe circule dans la chambre voisine, comme un trésor dans la forêt! Bonne chance, criais-je, et je voyais une mer de flammes et de fumées au ciel; et, à gauche, à droite, toutes les richesses flambant comme un milliard de tonnerres.

Mais l'orgie et la camaraderie des femmes m'étaient interdites. Pas même un compagnon. Je me voyais devant une foule exaspérée, en face du peloton d'exécution, pleurant du malheur qu'ils n'aient pu comprendre, et pardonnant! - Comme Jeanne d'Arc! - "Prêtres, professeurs, maîtres, vous trompez en me livrant à la justice. Je n'ai jamais été de ce peuple-ci; je n'ai jamais été chrétien; je suis de la race qui chantait dans le supplice; je ne comprends pas les lois; je n'ai pas le sens moral, je suis une brute: vous trompez..."

Oui, j'ai les yeux fermés à votre lumière. Je suis une bête, un nègre. Mais je puis être sauvé. Vous êtes de faux nègres, vous maniaques, féroces, avares. Marchand, tu es nègre; magistrat, tu es nègre; général, tu es nègre; empereur, vieille démangeaison, tu es nègre: tu as bu d'une liqueur non taxée, de la fabrique de Satan. - Ce peuple est inspiré par la fièvre et le cancer. Infirmes et vieillards sont tellement respectables qu'ils demandent à être bouillis. - Le plus malin est de quitter ce continent, où la folie rôde pour pourvoir d'otages ces misérables. J'entre au vrai royaume des enfants de Cham.

Connais-je encore la nature? me connais-je? - Plus de mots. J'ensevelis les morts dans mon ventre. Cris, tambour, danse, danse, danse, danse! Je ne vois même pas l'heure où, les blancs débarquant, je tomberai au néant.

Faim, soif, cris, danse, danse, danse, danse!

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Les blancs débarquent. Le canon! Il faut se soumettre au baptême, s'habiller, travailler.

J'ai reçu au coeur le coup de la grâce. Ah! je ne l'avais pas prévu!

Je n'ai point fait le mal. Les jours vont m'être légers, le repentir me sera épargné. Je n'aurai pas eu les tourments de l'âme presque morte au bien, où remonte la lumière sévère comme les cierges funéraires. Le sort du fils de famille, cercueil prématuré couvert de limpides larmes. Sans doute la débauche est bête, le vice est bête ; il faut jeter la pourriture à l'écart. Mais l'horloge ne sera pas arrivée à ne plus sonner que l'heure de la pure douleur ! Vais-je être enlevé comme un enfant, pour jouer au paradis dans l'oubli de tout le malheur!

Vite! est-il d'autres vies? - Le sommeil dans la richesse est impossible. La richesse a toujours été bien public. L'amour divin seul octroie les clefs de la science. Je vois que la nature n'est qu'un spectacle de bonté. Adieu chimères, idéals, erreurs.

Le chant raisonnable des anges s'élève du navire sauveur : c'est l'amour divin. - Deux amours! je puis mourir de l'amour terrestre, mourir de dévouement. J'ai laissé des âmes dont la peine s'accroîtra de mon départ! Vous me choisissez parmi les naufragés, ceux qui restent sont-ils pas mes amis?

Sauvez-les!

La raison m'est née. Le monde est bon. Je bénirai la vie. J'aimerai mes frères. Ce ne sont plus des promesses d'enfance. Ni l'espoir d'échapper à la vieillesse et à la mort. Dieu fait ma force, et je loue Dieu.

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L'ennui n'est plus mon amour. Les rages, les débauches, la folie, dont je sais tous les élans et les désastres, - tout mon fardeau est déposé. Apprécions sans vertige l'étendu de mon innocence.

Je ne serais plus capable de demander le réconfort d'une bastonnade. Je ne me crois pas embarqué pour une noce avec Jésus-Christ pour beau-père.

Je ne suis pas prisonnier de ma raison. J'ai dit: Dieu.

Je veux la liberté dans le salut : comment la poursuivre? Les goûts frivoles m'ont quitté. Plus besoin de dévouement ni d'amour divin. Je ne regrette pas le siècle des coeurs sensibles. Chacun a sa raison, mépris et charité: je retiens ma place au sommet de cette angélique échelle de bon sens.

Quant au bonheur établi, domestique ou non... non, je ne peux pas. Je suis trop dissipé, trop faible. La vie fleurit par le travail, vieille vérité: moi, ma vie n'est pas assez pesante, elle s'envole et flotte loin au-dessus de l'action, ce cher point du monde.

Comme je deviens vieille fille, à manquer du courage d'aimer la mort!

Si Dieu m'accordait le calme céleste, aérien, la prière, - comme les anciens saints. - Les saints! des forts! les anachorètes, des artistes comme il n'en faut plus!

Farce continuelle! Mon innocence me ferait pleurer. La vie est la farce à mener par tous.

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Assez! voici la punition. - En marche!

Ah! les poumons brûlent, les tempes grondent! la nuit roule dans mes yeux, par ce soleil! le coeur... les membres...

Où va-t-on? au combat? je suis faible! les autres avancent. Les outils, les armes... le temps!...

Feu! feu sur moi! Là! ou je me rends. - Lâches! - Je me tue! Je me jette aux pieds des chevaux!

Ah!...

- Je m'y habituerai.

Ce serait la vie française, le sentier de l'honneur !



Arthur Rimbaud


viernes, febrero 05, 2016

Mala Sangre




Heredo de mis antepasados galos los ojos azulblancos, el juicio estrecho, y la torpeza en la lucha. Considero mi vestimenta tan bárbara como la suya. Pero no engraso mis cabellos.

Los galos fueron los desolladores de bestias, los incendiarios de hierbas más ineptos de su tiempo.

De ellos, heredo: la idolatría y el amor al sacrilegio; — ¡oh! todos los vicios, cólera, lujuria, — magnífica, la lujuria; — y sobre todo mentira y pereza.

Me horrorizan todos los oficios. Patrones y obreros, todos plebe, innobles. La mano que maneja la pluma vale tanto como la que conduce el arado. — ¡Qué siglo de manos! — Yo nunca tendré mano. Además, la domesticidad lleva demasiado lejos. Me exaspera la honradez de la mendicidad. Los criminales repugnan como los castrados: en cuanto a mí, estoy intacto, y me da lo mismo.

¡Pero! ¿quién hizo mi lengua tan pérfida como para que guiara y protegiera hasta ahora mi pereza? Sin servirme de mi cuerpo ni siquiera para vivir, y más ocioso que el sapo, he vivido en todas partes. No existe una familia de Europa que no conozca. — Hablo de familias como la mía, que lo deben todo a la declaración de los Derechos del Hombre. — ¡He conocido cada hijo de familia!

¡Si poseyera antecedentes en algún punto de la historia de Francia!

Pero no, nada.

Es evidente que siempre fui de raza inferior. No comprendo la rebeldía. Mi raza sólo se sublevó para saquear: como los lobos al animal que no mataron.

Recuerdo la historia de Francia hija mayor de la Iglesia. Villano, habría hecho el viaje a Tierra Santa; rememoro caminos de las llanuras suabas, panoramas de Bizancio, murallas de Solima; el culto a María, el enternecimiento por el crucificado se despiertan en mí entre mil fantasías profanas. — Estoy sentado, leproso, sobre tiestos y ortigas, al pie de un muro roído por el sol. — Más tarde, mercenario, habría vivaqueado bajo las noches de Alemania.

¡Ah! más aún: con viejas y niños danzo el Sabbat en el rojizo claro de un bosque.

Mi recuerdo no va más allá de esta tierra y del cristianismo. Jamás terminaré de verme en ese pasado. Pero siempre solo; sin familia; ¿qué lenguaje hablaría? Nunca me veo en los consejos de Cristo; ni en los consejos de los Señores, —representantes de Cristo.

Quienquiera que yo fuese en el siglo pasado, sólo vuelvo a encontrarme hoy. Nada de vagabundos, nada de guerras vagas. La raza inferior lo cubrió todo — el pueblo, como se dice, la razón; la nación y la ciencia.

¡Oh! ¡la ciencia! Todo se ha retomado. Para el cuerpo y el alma, — el viático, — contamos con la medicina y la filosofía, — los remedios de buenas mujeres y las canciones populares arregladas. ¡Y los entretenimientos de los príncipes y los juegos que ellos prohibían! ¡Geografía, cosmografía, mecánica, química!...

La ciencia, ¡la nueva nobleza! El progreso. ¡El mundo marcha! ¿Por qué no habría de girar?

Es la visión de los números. Vamos hacia el Espíritu. Lo que digo es muy cierto, es oráculo. Comprendo, e incapaz de explicarme sin palabras paganas, quisiera enmudecer.

¡La sangre pagana retorna! El Espíritu está próximo, ¿por qué no me ayuda Cristo confiriéndole a mi alma nobleza y libertad? ¡Ay! ¡el Evangelio ha muerto! ¡el Evangelio! ¡el Evangelio!

Espero a Dios con verdadera gula. Soy de raza inferior por toda la eternidad.

Heme aquí en la playa armoricana. Que las ciudades se iluminen en la noche. He cumplido mi jornada; abandono a Europa. El aire marino quemará mis pulmones; me curtirán los climas perdidos. Nadar, pisotear hierba, cazar, sobre todo fumar; beber licores fuertes como metal hirviente, — a semejanza de aquellos queridos antepasados alrededor de los fuegos.

Regresaré, con miembros de hierro, la piel ensombrecida, la mirada furiosa: por mi máscara, me juzgarán de una raza fuerte. Tendré oro: seré ocioso y brutal. Las mujeres cuidan a esos feroces lisiados reflujo de las tierras cálidas. Intervendré en política. Salvado.

Ahora estoy maldito, tengo horror a la patria. Lo mejor, es dormir, completamente ebrio, sobre la playa.

No se parte. — Retomemos los caminos de aquí, cargado con mi vicio, el vicio que echó sus raíces de sufrimiento en mi flanco, desde la edad de la razón — que sube al cielo, me azota, me derriba, me arrastra.

La última inocencia y la última timidez. Lo dicho. No llevar al mundo mis repugnancias y mis traiciones.

¡Vamos! La marcha, el fardo, el desierto, el hastío y la cólera.

¿A quién alquilarme? ¿A qué bestia adorar? ¿A qué imagen santa atacar? ¿Qué corazones destrozaré? ¿Qué mentira debo sostener? — ¿Sobre qué sangre caminar?

Cuidarse, más bien, de la justicia. — La vida dura, el simple embrutecimiento— levantar, con el puño reseco, la tapa del féretro, sentarse, sofocarse. Así, nada de peligros, ni de senectud: el terror no es francés.

— ¡Ah! me encuentro tan abandonado que ofrezco a cualquier divina imagen mis impulsos hacia la perfección.

¡Oh mi abnegación, oh mi caridad maravillosa! ¡aquí abajo, sin embargo!

De profundis Domine, ¡si seré estúpido!

Cuando aún era muy niño, admiraba al presidiario intratable tras el cual se cierran siempre las puertas de la cárcel; visitaba los albergues y las posadas que él había santificado con su presencia; veía con su idea el cielo azul y el florido trabajo del campo; husmeaba su fatalidad en las ciudades. El era más fuerte que un santo, más sensato que un viajero — y él, ¡sólo él! como único testigo de su gloria y de su razón.

En las rutas, durante las noches de invierno, sin techo, sin ropas, sin pan, una voz oprimía mi corazón helado: "Debilidad o fuerza: hete aquí, es la fuerza. No sabes a dónde vas ni por qué vas, entra en todas partes, responde a todo. Como si fueras un cadáver ya no te podrán matar." A la mañana tenía una mirada tan extraviada y un aspecto tan muerto que aquellos que encontré quizá no me hayan visto.

En las ciudades el fango se me aparecía súbitamente rojo y negro, como un espejo cuando la lámpara circula en la habitación contigua, ¡cual un tesoro en el bosque! Buena suerte, exclamaba, y veía un mar de llamas y humo en el cielo; y, a izquierda, a derecha, todas las riquezas resplandecientes como un millar de rayos.

Pero la orgía y la camaradería de las mujeres me estaban prohibidas. Ni siquiera un compañero. Me veía ante una multitud exasperada, ante el pelotón de ejecución, llorando la desgracia de que ellos no hubieran podido comprender, ¡y perdonando! — ¡Como Juana de Arco! — "Sacerdotes, profesores, maestros, os equivocáis al entregarme a la justicia. Jamás pertenecí a este pueblo; nunca he sido cristiano; pertenezco a la raza que cantaba en el suplicio; no comprendo las leyes; carezco de sentido moral, soy una bestia: estáis equivocados…"

Sí, tengo los ojos cerrados a vuestra luz. Soy una bestia, un negro. Pero puedo ser salvado. Vosotros sois falsos negros, vosotros: maniáticos, feroces, avaros. Mercader, tú eres negro; magistrado, tú eres negro; general, tú eres negro; emperador, vieja comezón, tú eres negro: has bebido un licor sin impuesto, de la fábrica de Satanás. — Este pueblo se inspira en la fiebre y el cáncer. Inválidos y ancianos son tan respetables que piden que los hiervan. — Lo sagaz es abandonar este continente, donde ronda la locura para proveer de rehenes a esos miserables. Yo entro en el verdadero reino de los hijos de Cam.

¿Conozco tan siquiera la naturaleza? ¿me conozco? — Basta de palabras. Sepulto a los muertos en mi vientre. ¡Gritos, tambor, danza, danza, danza, danza! Ni siquiera vislumbro la hora en que, al desembarcar los blancos, me precipitaré en la nada.

¡Hambre, sed, gritos, danza, danza, danza, danza!

Los blancos desembarcan. ¡El cañón! Hay que someterse al bautismo, vestirse, trabajar.

He recibido el golpe de la gracia en pleno corazón. ¡Ah! ¡no lo había previsto!

Yo no hice el mal. Los días me serán leves, se me ahorrará el arrepentimiento. No habré padecido los tormentos del alma casi muerta para el bien, por la que asciende la luz severa como los cirios funerarios. El destino del hijo de familia, féretro prematuro cubierto de límpidas lágrimas. Sin duda el libertinaje es estúpido, el vino es estúpido; hay que dejar a un lado la podredumbre. ¡Pero el reloj no habrá llegado a dar más que la hora del puro dolor! ¡Me raptarán como a un niño para jugar al Paraíso en el olvido de toda desdicha!

¡Pronto! ¿hay otras vidas? —El sueño en la riqueza es imposible. La riqueza fue siempre un bien público. Unicamente el amor divino otorga las llaves de la ciencia. Veo que la naturaleza es sólo un espectáculo de bondad. Adiós quimeras, ideales, errores.

El razonable canto de los ángeles se eleva del navío salvador: es el amor divino. — ¡Dos amores! puedo morir de amor terrestre, morir de abnegación. ¡Dejo almas cuya pena se acrecentará con mi partida! Me has elegido entre los náufragos; los que quedan ¿no son acaso mis amigos?

¡Sálvalos!

Me ha nacido la razón. El mundo es bueno. Bendeciré la vida. Amaré a mis hermanos. Estas ya no son promesas infantiles. Ni la esperanza de escapar a la vejez y a la muerte. Dios hace mi fuerza, y yo alabo a Dios. 

*

El hastío ya no es mi amor. Las iras, el libertinaje, la locura, de la que conozco todos los impulsos y los desastres, — todo mi fardo está depositado. Apreciemos sin vértigo la extensión de mi inocencia.

En adelante seré incapaz de reclamar el consuelo de una paliza. No me creo embarcado para unas bodas donde Jesucristo es el suegro.

No soy prisionero de mi razón. He dicho: Dios. Quiero la libertad en la salvación: ¿cómo alcanzarla? Los gustos frívolos me han abandonado. Ya no necesito ni abnegación ni amor divino. No echo de menos el siglo de los corazones sensibles. Cada uno tiene su razón, su desprecio, su caridad: yo conservo mi sitio en la cumbre de esta angelical escala de buen sentido.

En cuanto a la felicidad establecida, sea o no doméstica... no, no puedo. Soy demasiado débil, demasiado disipado. La vida florece por el trabajo, vieja verdad: en cuanto a mi vida no es lo bastante pesada, y vuela y flota lejos muy por encima de la acción, ese adorado punto del mundo.

¡Cómo me convierto en solterona al fallarme el coraje de amar a la muerte!

Si Dios me concediera la calma celestial, aérea, la plegaria —como a los santos de antaño —. ¡Los santos, fuertes! ¡los anacoretas, artistas como ya no hacen falta!

¡Perpetua farsa! Mi inocencia podría hacerme llorar. La vida es la farsa en que participamos todos.

*

¡Basta! He aquí el castigo. ¡En marcha!

¡Ah! ¡los pulmones arden, zumban las sienes! la noche rueda en mis ojos, ¡con este sol! el corazón... Ios miembros...

¿A dónde vamos? ¿al combate? ¡Yo soy débil! los otros avanzan. ¡Las herramientas, las armas... el tiempo!...

¡Fuego! ¡fuego sobre mí! ¡Allí! o me rindo. — ¡Cobardes! — ¡Me mato! ¡Me arrojo a las patas de los caballos!

¡Ah!…

—Me habituaré.

Eso sería la vida francesa, ¡el sendero del honor!








Arthur Rimbaud



Una Temporada En El Infierno